Soutenons nos agriculteurs
Myriam Edward | Je pense que le manque d’informations est la cause parmi les plus importantes qui font que les gens ne se rendent pas compte de la situation réelle. 3% seulement des personnes actives sont dans l’agriculture 75% de la population est citadine et n’a pas ou peu de contact avec l’agriculture. Aujourd’hui, il y a 55’000 exploitations agricoles en Suisse et chaque année un certain nombre disparaît… il y en avait le double il y a 30 ans! Les réformes régulières du secteur agricole, dues notamment aux changements de population et d’habitudes, conduisent les agriculteurs dans des situations difficiles avec des revenus bas pour un travail énorme. Ces réformes sont parfois nécessaires pour un rééquilibrage, mais sont souvent également extrêmes pour obtenir plus de rendement.
Contraintes forcées
Les contraintes imposées pour bénéficier des paiements directs, aides et subventions prévues, sont telles que de nombreux agriculteurs :
• doivent investir premièrement pour mettre leur exploitation aux normes (il existe des prêts sans intérêts pour ça – mais à certaines conditions). Un exemple: l’installation d’une stabulation libre qui est devenue le «must» aujourd’hui pour le bien du bétail et selon une étude réalisée dans le cadre d’un travail de bachelor, la place par gros bétail s’élève à Fr. 17’490.-… Imaginez un exploitant ayant 100 vaches… et pourtant, il n’a pas le choix s’il veut maintenir son exploitation à flot et continuer à recevoir de l’aide de l’état pour survivre
• remplir des documents administratifs pour garantir que toutes les normes d’hygiène, de culture, de respect de l’environnement et des conditions de détention du bétail sont bien respectées, sont un casse-tête pour 99% de nos agriculteurs et surtout un investissement en temps énorme pour quelqu’un qui fait un travail physique et pénible entre 65 et 70 heures par semaine
Travail à l’extérieur
Le métier de paysan a beaucoup changé dans les 50 dernières années. Il y a eu de nombreuses améliorations en termes de machines et d’équipement, ce qui facilite quelque peu le travail, mais il y a aussi eu des changements énormes dans la production imposée et le rendement attendu. Oui, nous vivons des améliorations d’un côté… mais le métier en lui-même n’a pas changé. Nos agriculteurs sont encore et toujours confrontés aux mêmes défis découlant de la météo et des maladies. Certains, pour s’en sortir ont des emplois en dehors de l’exploitation… Ils doivent trouver des emplois qui leur permettent d’être là quand il faut agir sur l’exploitation, par exemple quand il faut moissonner… ce sont donc des emplois précaires, qui rapportent quelques sous… quand on peut travailler! Un engagement fixe est très rare, voire impossible quand l’agriculteur est seul sur son exploitation…
Produits « sûrs » en alimentation
D’autres essaient de développer un commerce avec les produits de leur exploitation et proposent aux gens de leur région de trouver des aliments non modifiés et authentiques… mais ils essaient, de par ce biais, également de mettre un peu de beurre dans les épinards, car eux aussi ont chaque mois des factures à payer. Que l’on parle de vente directe de légumes, de fleurs, de viande, d’œufs, etc… la clientèle est existante et c’est un vrai marché à développer. De plus en plus de personnes souhaitent revenir à des produits «sûrs» en alimentation, à des produits sains qui ne contiennent pas d’éléments conservateurs ou d’exhausteurs de goût… Il existe également une clientèle qui se réjouit, le temps d’un brunch à la ferme, de se changer les idées et de découvrir un monde inconnu ou peu connu, où l’on retrouve la simplicité et l’authenticité, et qui a tellement à offrir! Ce sont des valeurs chères à notre pays et à ses habitants.
Donnons la chance
Dans notre monde dit «civilisé», nous passons plus de temps derrière nos écrans et notre volant de voiture que dans les contacts humains. Et ce n’est pas au travers des réseaux sociaux que l’on se fait des amis… car 500 amis sur Facebook, ne remplaceront jamais un vrai ami à qui l’on peut parler en direct et avec qui l’on peut échanger! Donnons la chance à nos agriculteurs de se diversifier et à nos concitoyens, de revenir à des valeurs authentiques et sûres. Choisir cette voie-là ne se fait pas non plus sans contrainte! Là aussi, nos paysans/annes doivent investir de l’argent et du temps dans des formations pour que les normes d’hygiène et de production soient respectées! Encourageons-les dans ces voies qui leur permettent de continuer à gérer leur exploitation, à élever leurs enfants en étant à la maison et qui nous permettent à nous, de retrouver des produits authentiques et sains.