Mon plus beau souvenir… Cours de cuisine avec une famille du camp de réfugiés d’Aïda
par Maya Chollet | Un cours de cuisine dans une famille palestinienne, un souvenir inoubliable. J’ai passé la nuit avec mon amie, rencontrée à Petra, dans une famille palestinienne du camp d’Aïda. Ahmad et Islam ont 6 enfants, dont un gravement handicapé. Pour ces enfants, rien n’est prévu, rien n’est fait. Un jour les femmes du camp ayant un enfant handicapé se sont réunies. Juste comme cela, pour parler. Et cela a été le début d’une grande histoire. Elles ont obtenu de petites choses, mais de grandes victoires pour cette communauté. D’abord pour un truc tout bête, les couches! Elles sont très chères à la pharmacie, alors les femmes ont commencé à les commander à un grossiste qui fournit les hôpitaux. Puis le projet des classes de cuisine a été lancé. L’idée? Faire découvrir la cuisine palestinienne aux gens, et proposer un hébergement. Les bénéfices sont reversés aux familles qui ont des enfants handicapés, pour les soutenir. Nous avons bien ri, autant en faisant les Krass aux épinards et à la viande hachée qu’en lavant les plats. Les 4 filles de la famille m’ont appris à mettre le hijab… oui, les amis, j’ai été voilée pour une heure, et marquée pour une vie! D’autres femmes sont venues nous rejoindre, puis d’autres touristes-cuisiniers. Islam nous a appris les gestes, les épices et les noms arabes. Ahmad nous servait des litres de café arabe dans des mini-verres et la farine volait partout. Les petits Krass sont en fait des sortes de pizzas, ils sont plats et tartinés de viande hachée pour la moitié, fourrés aux épinards et pliés en forme de petits triangles pour les autres. Le tout est mis à cuire dans un étrange poêle à bois, et prend le goût de la grillade.
Entre deux cuissons, je suis montée sur les toits. On voyait tout le camp, les autres toits couverts de citernes pour ne pas perdre une miette de la précieuse eau, faire sécher la lessive et se reposer. De là-haut, j’ai vu le mur. Je l’ai méprisé en silence, avec un respect très étrange, que l’on développe souvent pour les choses que l’on ne comprend pas.
Je n’ai pas pu partager le repas jusqu’à la fin. Vous vous souvenez du pont dont je vous ai parlé? Celui de la frontière? Eh bien il était fermé. J’ai dû après mille inquiétudes transiter par le pont au nord d’Israël, celui qui débouche sur la fin de la vallée du Jourdain. Puis il fallait encore redescendre la vallée jusqu’à Amman. 4 heures de plus que prévu… pour un pont. Je vous épargne le récit des check-points, des interrogatoires bis, de la fouille du taxi, des modalités de sortie d’Israël, d’entrée en Jordanie, les regards glacés des jeunes Israéliens à la frontière et leur façon de tenir leur mitraillette: on y serait encore demain.