L’étoile filante de Vuibroye, Lucas Légeret a hâte de rouler
Joseph Patrice Meyong | Les pieds sur terre et la tête sur les épaules, il veut relever à grande vitesse tous les défis des circuits automobiles. Précoce, son jeune âge l’oblige pourtant à lever le pied sans pour autant renoncer à l’objectif principal, celui de «réussir». Regarder droit devant et aller vite est presque une philosophie. Pour lui, la course est une véritable école de vie.
Lucas Légeret : portrait d’un jeune espoir
Une gestuelle affirmée, un ton sûr et un regard franc, au crépuscule de sa quinzième année, Lucas est déjà à l’aise avec l’environnement médiatique. Il argumente sans se confier, sans citer de nom. Il ne sort pas du cadre, comme une voiture, il sait tenir la conversation. L’intérêt des médias l’a un peu surpris. En quelque temps il a enchaîné les interviews. A sa grande surprise, il a été spectateur de la multiplication des parutions sur divers journaux locaux. Aujourd’hui, il n’a plus qu’une seule envie, celle de donner raison à ceux qui ont misé sur lui.
Lucas se définit comme «un pur Suisse». Il a du mal à parler de lui. Né le 10 mai 2001, avec son 1,92 m,
il est content de n’être pas le seul grand de taille de son école. Lucas est en première année de maturité gymnasiale dans une école privée à Lausanne. Une fois son diplôme dans la poche, il projette d’étudier l’ingénierie mécanique à l’EPFL. A côté des courses automobiles, il est passionné de mécanique, de robotique, d’informatique liée à tous les objets qui volent tels que les avions, les drones, les hélicoptères. Dans le cadre de sa formation, il travaille déjà sur un projet lié au drone avec l’EPFL.
Quand il parle de son entourage, il parle d’équipe, de famille, sans citer des noms. Il s’inscrit toujours dans un collectif, dans son équipe de course automobile comme dans son école. Il n’exige aucun statut particulier. Il ne s’attend aucunement à un traitement de faveur. Après une semaine de compétition, il bosse deux fois plus pour rattraper son retard. Avec un calendrier de sportif de haut niveau, son temps se partage entre les entraînements (la course à pied), les essais, la compétition et les cours.
Comme tous les jeunes de son âge, il a quelques hobbies. Les voitures bien sûr, la mécanique aussi. Il aime avoir des objets dans les mains, bricoler. Il aimerait comprendre et maîtriser toute la mécanique qui est derrière les machines. Il n’a pas de rêve, mais des objectifs «S.M.A.R.T» (Spécifique-Mesurable-Acceptable-Réaliste-Temporellement défini). Il a bien compris qu’une carrière de pilote automobile professionnelle ne tient pas à grand-chose. Tout peut aller vite, aussi dans tous les sens. Il ne se prend pas pour une star. Il n’est pas grisé par la popularité. Il est conscient des enjeux, des attentes. Il donne et donnera tout pour «réussir». Il ressent la pression avant la course, celle-ci s’envole quand il a les pieds sur les pédales. Il a les pieds sur terre. Sans trop le dire, cela se voit, il a une mentalité de gagnant.
L’aventure commence à 4 ans
Un jour son papa le met dans un kart. Pas de chance, celui-ci est mal réglé. Il va dans tous les sens, et Lucas subit un mini-accident sans aucun dommage. A cet âge, il connaît sa première grande peur. Dès lors, il ne quitte plus jamais le kart et les circuits du karting avec pour objectif, celui de maîtriser cette machine filante. Il connaît un apprentissage express. Il fait tout pour aller de plus en plus vite. La piste des tous petits ne lui suffisant plus, il fait tout pour passer aux pistes plus rapides. A sept ans et demi, il commence la compétition. Il cumule les podiums, les victoires et les trophées. Il franchit les paliers à grande vitesse. Il répète de bonnes performances durant les compétitions nationales et internationales. Son ascension fulgurante le mène jusqu’au championnat LMP3. A 15 ans et demi seulement, il signe un contrat lui permettant de postuler à cette catégorie encore plus rapide. En avance sur le temps, Lucas doit patienter, il devra attendre ses 16 ans pour entrer dans la cour des grands.
Conscient de son talent, il ne le dit pas, il parle avec modestie de son parcours et de son palmarès actuel. Avec plusieurs trophées à son actif, comme grands moments de sa carrière, il parle vaguement des quelque quatre à six top 10. Ce qui ressort par contre, c’est la pression qui pèse sur les épaules du pilote. Avec un team d’une trentaine de personnes, il se refuse d’être en dessous des attentes. La concentration d’avant le départ est indispensable, durant la course, l’adrénaline est à son comble et il ne se rend même plus compte qu’il va vite.
A l’aube de ses seize ans, Lucas ne garde que le positif. Il n’a aucun regret. Comme zone d’ombre, il cite quelques pépins physiques, on dira comme tout le monde. Il s’est fait sortir de pistes quelques fois, pourtant il avait une bonne place. Sa grande taille, qui aurait pu être considérée comme un handicap par certains (la plupart des pilotes ont une taille moyenne) est pour lui une source de motivation. Il en rigole d’ailleurs en disant: «j’aurai dû naître avec un ballon de basket dans les mains».
Pour son futur, tout est mesuré. Il ne ferme aucune porte, il ne se met aucune limite. Il ira jusqu’où l’aventure le mènera. Il est prêt à titiller les sommets comme à travailler comme ingénieur. Il est bien entouré, un team professionnel et une famille aimante. Habitant avec sa famille dans une paisible ferme à Vuibroye, propice pour recharger les batteries, ses parents n’occupent aucune fonction officielle dans sa carrière, ce sont juste des parents qui l’accompagnent et le soutiennent. Il n’en dit pas grand-chose, mais dans ses yeux on comprend qu’ils représentent beaucoup… C’est aussi pour eux qu’il a envie de «réussir».