intégration: la nouvelle
Aujourd’hui, à l’école, il y a une nouvelle. La maîtresse a dit qu’elle vient d’une école privée et qu’elle revient à l’école publique. Je savais pas moi qu’on était à l’école publique. Je vois pas très bien ce que ça change. L’école, c’est l’école. Mais quand même, à la récré, on lui a demandé de nous expliquer l’école privée pour se faire une idée en gros et savoir ce qui est le plus mieux bien. En gros, c’est presque la même chose, sauf les habits.
Dans son autre école, les filles doivent mettre des jupes plissées et avoir les cheveux attachés et on a trouvé que ça, c’était très bien. Sam, mais son vrai nom c’est Samantha, elle pourrait plus nous mettre des goals au foot. Pour les cheveux, ça changerait rien, elle a une coupe garçon. Quand la nouvelle a dit que les garçons devaient venir en chemise, en pantalon et en blazer boutonné, on a trouvé ça un peu moins bien. Elle nous a expliqué ce que c’était qu’un blazer, le seul truc de bien pour le blazer, c’est l’insigne.
Et puis, il faut dire que nous, nos vestes, à la récré, on les utilise comme poteaux de goals, jusqu’à ce que la maîtresse voie et nous demande de nous rhabiller. La maîtresse, les vestes, elle les voit seulement de novembre à avril, mais on la feinte un peu. On fait des tournus.
A l’école privée, les garçons et les filles sont séparés. Il y a ceux qui trouvaient ça bien et ceux qui trouvaient ça nul. Moi, je savais pas trop. Les filles des fois, à l’école, c’est utile, mais dans la cour de récré, à part Sam, pas vraiment. On dirait que les filles, elles font exprès de venir sauter à l’élastique juste devant le penalty. Elles comprennent rien aux règles de hors-jeu, sauf Sam. Sam, elle a des frères qui font du foot et un papa qui est arbitre, donc elle s’y connaît, c’est obligé.
Après pour faire connaissance, on lui a posé des questions un peu plus perso à la nouvelle. Marco a voulu savoir ce que son papa avait comme voiture. Marco son point fort, c’est les voitures. Il sait tout sur les voitures, sauf qu’on lui met jamais de problèmes sur les voitures et le prix des jantes en aluminium.
La nouvelle a dit une «Jaguar» et Marco a dit que ça, ça existait pas, que c’était une menteuse et que d’ailleurs on disait pas une jaguar, mais un jaguar, que tout le monde savait ça. Ça a jeté un froid. J’ai dit que ma mémé à moi, elle avait une «Panda». Et là, j’ai pas compris parce que Marco m’a fusillé du regard et la nouvelle m’a regardé avec un petit air de triomphe dans les yeux. Elle a dit qu’on ne disait pas une panda, mais un panda, que tout le monde savait ça. Elle me plaît bien la nouvelle, elle se laisse pas faire, elle est cool. Pour finir, Marco a dit que les Ferrari, c’était ce qu’il y a de mieux de toute façon et on a tous été d’accord et Marco était content. Elle s’est vite intégrée la nouvelle, dans l’école publique.
Quand je suis rentré à la maison et que j’ai raconté ça, Maman m’a dit qu’une «Jaguar» c’était rare, mais que ça existait et que, papy et mamy, quand ils étaient jeunes, ils avaient appris à conduire avec une «Deux Chevaux» Et ça, comme nouvelle, ça m’a achevé…
Nicolas 7 ans et demi
Propos recueillis par Rosane Schlup