Hivernage
Christian Dick | Si la plupart des usagers des chemins de fer sont scotchés à leur écran, les doigts flirtant avec le clavier et un écouteur vissé aux oreilles, certains regardent le lac et s’en émerveillent. Mais ils sont plutôt rares. Les promeneurs du dimanche qui aiment le lac ou en longent les rives se posent peut-être aussi la même question: Pourquoi une partie des bateaux déserte-t-elle l’eau des ports à l’approche de l’hiver?
La réponse n’est pas universelle. Comme partout, il y a les pour et les contre, ceux qui ont raison et les autres aussi. Quelques anciens prétendent qu’il est totalement inutile de sortir un bateau de l’eau pour le laisser bâché sur un ber. D’un levage à l’autre, ils constatent que leur embarcation n’a pas pris un kilo et par conséquent pas un litre d’eau non plus. Le bateau restera donc à l’eau pour laquelle il est fait! Ce sont les contre.
Dans ce même camp on trouve aussi les propriétaires d’un bateau en bois. Généralement, le bois n’aime pas sécher. Les bordés, s’ils ne sont pas collés, s’écartent sous l’effet de la bise. L’embarcation demandera à goger longtemps avant sa mise à l’eau ce qui, les beaux jours et l’activité à la grue revenus, n’arrange personne. Ces voiliers sont généralement mieux dans leur élément.
Les pour sont plus nombreux. D’aucuns pensent qu’un bateau en plastique doit sécher pour éviter tout risque d’osmose ou de gel. Le gel, sous nos latitudes, n’est pas avéré, du moins dans l’eau. Et pour faire simple, l’osmose est la formation de bulles sous le polyester de la carène, la partie immergée de la coque, due à un phénomène chimique, la diffusion de solvants. L’osmose réduit les performances d’un bateau. En séchant son bateau, on en ralentit le développement.
Ces navigateurs pensent aussi qu’une bâche est mieux tendue quand le bateau repose sur sa remorque. Et après un vent fort il est nettement plus aisé de retendre la bâche d’un bateau à terre. Le confort est donc un élément du choix.
Il n’est plus nécessaire de règler les amarres du fait de l’abaissement du niveau du lac en hiver et on ne risque aucune chute à l’eau consécutive à un déblaiement de neige.
On compte également dans les pour ceux qui ont un bateau à moteur. Pour éviter tout risque de gel, ils purgent à quai l’eau de refroidissement du moteur. Ils confieront peut-être un service au chantier. Sortir un bateau à moteur ne nécessite aucun effort particulier. Il n’y a pas lieu de démâter, ni de plier les voiles ou de graisser l’accastillage. Certains bateaux doivent impérativement larguer leurs amarres. Ce sont les voiliers à fort tirant d’eau. Le niveau du lac baisse en hiver et les oblige à quitter leur mouillage pour que la quille ne touche pas le fond.
Dans le Nord, l’obligation de vider le port est justifiée. L’eau gèle et emprisonnerait le bateau, ce que nous ne connaissons pas sur nos lacs, lac de Joux mis à part. En somme, il y a une saison pour naviguer comme une autre pour le ski. Pourtant l’hiver offre des conditions de navigation exceptionnelle, notamment aux voiliers. L’air est limpide, l’eau cristalline et les vents constants. Ces passionnés sont dans le camp des contre. Aucun bateau à moteur ne vous incommodera de ses vagues ou de son bruit. Certains sont équipés d’une sono que riverains ou navigateurs préféreraient ne pas avoir à subir. On le voit, les raisons d’un choix sont multiples.
Ami lecteur, peut-être vous ferez-vous votre propre opinion en allant vous balader du côté d’un port. Ce sera aussi l’occasion d’apprécier l’état de la carène et les dimensions du bateau, souvent plus imposantes qu’il y paraît dans l’eau. Nous parlerons dans un prochain article du programme des clubs nautiques sur notre magnifique plan d’eau.