« Y en a point comme nous » : vraiment ?
J.-G. Linder | Au Musée romain de Lausanne-Vidy, le temps d’une exposition, un miroir est tendu aux Vaudois: sont-ils, en effet, si différents des autres Suisses et du monde pour pouvoir affirmer, voire même proclamer: «Y en a point comme nous» ? La réponse appartient aux visiteurs.
Ainsi les membres de l’Association du Vieux Lavaux et leurs amis, le 23 janvier dernier, ont été invités à se reconnaître, ou pas, dans les diverses représentations des Vaudois. Pour ce faire, Bernadette Gross et Laurent Flutsch les ont aidés à y voir plus clair.
Il y a d’abord le langage des Vaudois avec son accent; à l’évidence celui-là les différencie en particulier de leurs voisins français si prompts à déceler un «accent suisse», parfois même ne comprenant pas la Lausannoise réclamant un «cornet» pour ses achats – autrement dit: un «sac» – sur le marché d’Evian. Or, relève à juste titre la linguiste Bernadette Gross, dans son exposé intitulé « Quèche-té batoille ! Laisse causer les Vaudois ! », il n’y a pas un «accent suisse», mais de multiples accents cantonaux en Suisse romande: neuchâtelois, genevois, jurassien, fribourgeois, valaisan, voire avec des intonations plus locales comme à La Côte, ou dans le Nord vaudois, ou aux Ormonts, par exemple. A ces particularismes régionaux s’ajoutent encore des archaïsmes de langage issus du français en usage depuis le 12e siècle en Suisse romande, et des restes de patois vaudois issus du franco-provençal; ce patois avait perduré à la campagne malgré son interdiction en 1806. Seule la toponymie a conservé quasi intact l’héritage du patois.
Avec les paysages, les objets et les gens la question de la pure «vaudoisitude» reste complexe, note le conservateur Laurent Flutsch, tant le Pays de Vaud est depuis toujours ouvert au passage et donc au brassage. Dans sa «pâte», au fil du temps, Vaud a absorbé beaucoup d’ingrédients de ses hôtes, comme le montrent une des salles de l’exposition et le livre «Y en a point comme nous. Un portrait des Vaudois aujourd’hui» de Séverine André & Laurent Flutsch avec une contribution de Bernadette Gross. (Gollion: Infolio éditions, 2015).
Quelle que soit la réponse, le dernier mot revient à Jean Villard Gilles qui écrivait au début de La Venoge : « On a un bien joli canton ».
La visite s’est « naturellement » terminée par une verrée bien vaudoise ! L’exposition, quant à elle, est prolongée jusqu’à mi-avril.